Secours aux colons déportés en 1796

 

Avant la révolution, la colonie de Saint-Domingue est la plus prospère des possessions françaises d'outre-mer, reposant sur le travail d'un demi-million d'esclaves africains, ses 792 sucreries, 2 810 caféteries, 3 097 indigoteries et 705 cotonneries. La perte de Saint-Domingue, consécutive à la révolte des esclaves, a conduit en métropole un flot important de réfugiés, anciens colons ayant perdu leurs plantations, mais aussi petits commerçants, artisans, fonctionnaires civils ou militaires. Cet afflux a nécessité la prise en charge par l'état de ceux d'entre eux qui étaient dépourvus de tout mooyen d'existence.  

Le 7 nivôse an 3 (27 décembre 1794) décret de l’assemblée nationale qui applique aux habitants de Saint Domingue et d’autres colonies françaises les dispositions de la loi du 27 vendémiaire an 3 (18 octobre 1794) relatives aux colons déportés.

C’est ainsi qu’en séance de l’administration municipale du canton de Blanquefort le 5 floréal an 4 (24 avril 1796), le président Saincric a fait lecture de la « pétition du citoyen Jude, colon, pour obtenir des secours que la loi lui accorde. Après avoir pris des renseignements les plus exacts sur le compte du citoyen qui prouvent les malheurs qu’il a éprouvé dans les colonies et l’état de détresse où il est réduit est d’avis avec le commissaire qu’il soit compris dans la classe la plus forte des secours à accorder aux américains. »

Dix jours plus tard, en séance du 15 floréal an 4 (4 mai 1796), le président Saincric a annoncé que « Le citoyen Jude, colon, domicilié de la commune du Bouscat, apporte une pétition par laquelle il réclame les secours que les lois du 27 vendémiaire et 7 nivôse l’an 3, et l’arrêté du directoire exécutif du 13 brumaire dernier accordent aux colons qui ont éprouvés des dévastations sur leurs propriétés par l’insurrection générale des nègres. L’administration considérant que le citoyen Jude a suffisamment justifié de la légitimité de sa demande et que tous les renseignements que l’administration a pu se procurer sur son compte viennent à l’appui de sa réclamation. Considérant que d’après l’arrêté du directoire du district en datte du 19 floréal l’an 3, il est du au citoyen Jude ainsi qu’a sa femme et a sa fille douze mois et trois jours qui auront à courir jusqu’au premier prairial prochain, attandu que le même arrêté courant jusqu’au 29 suivant. Considérant enfin que par la loi du 27 vendémiaire an 3, il est dit art 4, que les réfugiés ou déportés âgés de plus de 60 ans recevront trois livres par jour et les femmes du même âge 40 sols, que l’arrêté du directoire exécutif en datte du 11 brumaire l’an 4, ils recevront le double de leur traitement à compter de ce jour. »

 Le citoyen Jude était propriétaire de caféterie (usine où l'on torréfie le café).

 

Quelques mois plus tard, le 5 fructidor an 4 (22 août 1796), un autre citoyen demande des secours : « Le citoyen Jean Durand négociant colon réfugié âgé de 49 ans résidant au Bouscat, y étant arrivé le 16 messidor dernier an 4 a présenté une pétition tendante à recevoir les secours que les lois du 24 vendémiaire et 7 nivôse dernier accordent aux colons que l’insurrection des nègres a causé par la dévastation de leurs biens et propriétés. L’administration considérant que ledit Durand a suffisament justifié de la légitimité de sa demande, que tous les renseignements qu’elle a pris sur son compte viennent a l’appui de sa réclamation, arrête qu’il doit être payé audit citoyen par le ci devant receveur du district la somme de 225 livres conformément aux lois précitées qui ont commencées à courir le 16 messidor dernier. » [orthographe respectée].

 

NB : de 1790 à 1801, la commune du Bouscat fait partie du canton de Blanquefort. 

 

Source : registres 4 et 5 des délibérations de l'administration du canton de Blanquefort, transcrit par Martine Le Barazer.