Le village d’Andrian

Ce petit village figure sur la carte de Cassini, sur la carte départementale de 1843, et la carte d’état-major de Napoléon.

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Ce village comptait une dizaine de maisons et une cinquantaine d’habitants en 1820. La route qui longe les maisons depuis le centre bourg vers Magnol a pratiquement le même tracé. Dans l’autre sens, le village a été coupé par une voie d’intérêt général (liaison des boulevards de Bordeaux à Ludon Médoc en franchissant la Jalle vers Terrelade) suite à une décision du conseil municipal de 1859.

A l’aube de la Première Guerre mondiale, ce village a quasiment doublé son nombre d’habitants et de maisons, au recensement de 1911 : 101 habitants pour 22 maisons.

Le coeur du village a, depuis le XIXe siècle, subi peu de transformation, contrairement à celui de Carpinet.

Par contre, les activités sont totalement différentes, car le petit village d’agriculteurs avec des terres qui s’étendaient en direction de Magnol est transformé aujourd’hui en établissements scolaires, routes et habitations.

Voyons comment se situe-il : une petite voie le traverse, la rue d’Andrian.

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A l’entrée, c’était une ferme (n° 2) avec ses dépendances en briques (n° 5 et 7 ) et d’autres en face (actuellement un kiné y exerce son activité au n° 4). En matière de datation, disons que la ferme est postérieure à la Seconde Guerre mondiale, certaines dépendances du début du XIXe siècle.

Cette ferme est l’ancienne propriété de M. Dussouchaud qui m’a sympathiquement reçu pour me conter quelques souvenirs de sa vie à Blanquefort et à Andrian.

 

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Son père était de Confolens. Il est arrivé à Blanquefort pour y exercer une activité dans l’agriculture. M. Dussouchaud est né voilà 87 ans rue Alcide Lançon. Il a commencé à travailler la terre avec son père dès l’age de 15 ans.

Avec son père, ils ont pris les terres en viager par 2 fois car elles appartenaient à 2 sœurs sans descendance. Jeune, il vivait dans le village de Carpinet. Sa 1ère maison était dans l’alignement du bâtiment de l’école de filles. Elle serait aujourd’hui sur la route ! Le village a été rasé (son expression) pour faire la route et l’espace « la poste et les impôts ». Cétait, selon ses dires, le cœur de Blanquefort. A Carpinet, il y avait une dizaine de maisons. Il se souvient du petit rué qui passait le long de Muratel.

Jeunes, dit il, nous portions à quatre la statue de la Vierge en procession dans le bourg. Le feu de la Saint-Jean se tenait au centre de Blanquefort. « J’allais me baigner dans la Jalle coté Terrelade, en bas du pont car il y avait une belle plage de sable et une cabanne en bois. Cette cabane faisait office de buvette et guinguette. Nous allions à bicyclette au bal chez Filatreau à Caychac. »

Jeune et sans le permis, M. Dussouchaud tenait un banc au marché des Capucins pour vendre la production. Et quelle production ! Pommes de terre, carottes, choux fleurs, poireaux, radis tomates, asperges et autres sur près de 20 hectares. Les terres étaient cultivées depuis le village jusqu’en bas vers Magnol. Là où on ne pouvait produire des légumes, on y mettait les vaches à pacager et Dieu sait qu’il y avait beaucoup de vachers en ce temps-là. M. Dupuy a rasé ses granges et a vendu ses terres, des maisons ont fleuri. M. Dussouchaud père a vendu les terres où nous plantions les pommes de terre pour créer le centre commercial de la Renney, et moi j’ai vendu pour que se construisent les installations sportives et le gymnase du Port du Roy. J’y faisais les pommes de terre ! Le maraîcher Dupuy, celui de Carpinet, a fait comme mon père, son ancien champ de pomme de terre est devenu la résidence « la Renney ».

La ferme d’Andrian a été restaurée à la force des poignets. Dans le passé, tout a brulé à cause d’un tracteur. La reconstruction des dépendances se voit au type de briques employées.
Les anciennes dépendances dans lesquelles stationnaient 2 camions et 2 tracteurs sont inutilisées pour l’instant. Dans l’exploitation, nous avions aussi des chevaux.

Sur le côté des dépendances (cabinet de kiné), par un petit chemin, nous arrivons à l’arrière du chai, sur une placette. La vision est particulière car nous sommes en point haut et les maisons face à nous semblent « basses ». En fait, elles sont en contrebas ! Sur le plan des archives départementales on voit bien la placette. On peut y accéder aussi par la rue du Port du Roy, au tout début, c’est un chemin de terre qui donne accès à la maison sise au 5 rue du Port du Roy.

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Depuis cette placette, on observe que toutes les toitures sont imbriquées comme s’il s’agissait d’une même famille, d’un seul propriétaire. En fait, 2 familles différentes vivaient côte à côte. Entre les dépendances et maisons, des portes permettaient de communiquer d’un côté ou de l’autre.

Sur cette placette, je suis accueilli par M. Claude Bedin qui habite la maison sise au 5 rue du Port du Roy. Elle date de 1850 ainsi que sa dépendance. Dans sa dépendance, une ancienne porte (aujourd’hui condamnée) permettait d’accéder dans la construction mitoyenne qui est au 8 rue du Port du Roy.

En travaillant la terre, il a découvert une vierge de Verdelais. A présent, elle décore le mur pignon.

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Lorsque l’on cherche derrière cette placette, les constructions sont similaires sur le plan technique. Ces constructions datent donc du XIXe siècle. Il suffit de poursuivre la rue du Port du Roy et après le n° 7 vous découvrez une ancienne cour avec plusieurs constructions, presque toutes de la même famille.

 

Témoignage de Mme Sylvette Gélie  

 

« J’ai connu ce quartier depuis ma tendre enfance. Ma tante Emilia Perodeau a intégré la maison basse située juste avant la petite « ruette » qui relie le premier passage dans la rue du Port du Roy à celui qui ouvre le village par la rue d’Andrian, et qui est devenu une rue.

2013, centenaire d’Emilia Perodeau en 2013, à ses côtés Huguette Moustié, et Jean Pierre Gélie.

Centenaire-Emilia-Perodeau-Huguette-Moustie-Jean-Pierre-Gelie

 

Là, j’y ai vu Madame Louise Massé, une dame très âgée, laquelle marchait complètement pliée en deux à force de travail dans les champs. Elle utilisait son âne pour la transporter dans une petite carriole, ou charrette.

Ma tante a habité sa maison d’Andrian dans les années 1945 ou 1948... A l’emplacement de la vigne qui faisait l’angle du carrefour, est construite une nouvelle maison, face au MacDo. C'est la maison de son fils.

1951-vendanges-Huguette-et-Sylvette-Gelie   

 

1951, groupe de vendangeurs. Sous les chapeaux, les 2 soeurs Moustié : Huguette 14 ans, Sylvette 12 ans.  Michèle Vert, du quartier, Guy Bachelot, 15 ou 16 ans, un neveu de Ludon. Les petites filles : la blonde Lili Lebrigand, et la brune : Josette Louley, la dame âgée en arrière-plan est Zélia Louley. Le toit est celui de la maison de ma tante. Le mur haut de la maison en arrière-plan c’est le 5 rue du Port du Roy : c'était la maison de la famille Gélie, Paul et Suzanne

 

 

 

 

En face et à l’emplacement de la résidence, existait un trou immense, appelé « la sablière ». Pendant l’occupation, les Allemands, à moto, venaient s’y divertir.
Les ordures ménagères, collectées alors par cheval et tombereau, y ont été déversées durant de nombreuses années. »

 

 

 

 

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Derrière ces constructions se situe la rue Andrian. Par derrière, en descendant vers la voie ferrée, un verger était planté.

Après le n° 7 de la rue du Port du Roy, en poursuivant, vous retrouvez la rue Andrian. Dans le virage sur droite se situe une autre ferme, celle de M. Vert, habitée actuellement par son petit-fils.

Rue-Andrian-Vert-2Rue-Andrian-Vert-3 Rue-Andrian-Vert-1                          

 

 

Mais Andrian n’est pas que ce petit village ! Allons voir Andrian-nord car le centre commercial de la Renney est dans Andrian. Je rappelle que c’était un champ de pommes de terre de M. Dussouchaud.

La grande bâtisse qui fait angle avec la rue Georges Mandel, mitoyenne avec le centre commercial de la Renney, était une grange, propriété de la famille Lauga. La maison basse, à côté, leur appartenait et ils étaient aussi exploitants agricoles avec des terres dans les marais. L’activité principale du grand père, M. Dupuy, était le lait qu’il apportait à la laiterie située sur le chemin de Labarde, la grande bâtisse située sur le bord du chemin avec de grands silos. Ces bâtiments figurent sur la carte départementale d’état-major de Napoléon. En face de la grange étaient implantées les serres de la pépinière Rigallaud et la belle demeure, la villa Andrian bel-Air, qui a été rasée à la suite d’un incendie causé par des squatteurs.

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Autrefois c’était une ferme de la famille Rouillard (Marie France, Bernard et Philippe y ont passé leur enfance !) A ce propos la famille Bosc et la famille Rouillard sont proches parents. Relisez la petite histoire des marais, l’allée des Flamands. La famille Rouillard m’y a accueilli.

Le carré de terre qui s’étend de l’actuel MacDo à la rue de la gare était aussi Andrian, des terres agricoles. Le côteau était planté en vigne jusqu’à la voie ferrée. De l’autre côté, c’était plutôt l’élevage. Il y avait un élevage de porcs derrière l’actuel lycée professionnel.

M. Laurent se souvient, travaillant chez M. Rigallaud, horticulteur, que, préparant un carré de terre, le tracteur arrachait des ceps de vignes et avait découvert de grosses pierres, restes d’une vieille construction enfouie. De même, à l’autre bout d’Andrian, le coteau près de Solesse était planté de vignes.

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En fait, on oublie souvent que le phylloxera fit des ravages dans la seconde moitié du XIXe siècle (la production française a chuté de 2/3).

 

Merci à tous ceux qui ont généreusement partagé leurs souvenirs et leurs photos. 
La suite se fera avec la complicité d’autres habitants de la commune et d’archives.

 

Texte et photos de Pierre-Alain Leouffre.
Les 4 dernières photos extraites du site de l'agence urbaine d'urbanisme Bordeaux Aquitaine