Le sol de la commune.

 

Blanquefort, commune de l'aire urbaine de Bordeaux, compte 3 372 hectaresdont une large partie est inconstructible. En effet, la moitié orientale, proche de la Garonne et de la rivière Jalle de Blanquefort est formée d'anciens marais. Ces marais ont été asséchés à partir du 17e siècle par des Hollandais mais ils sont toujours classés en zones inondables. Cette partie de la commune sert donc de prés pour un peu de bétail. Une carrière d'extraction de graves y est installée ; elle a creusé le second plus vaste plan d'eau de la banlieue bordelaise. La moitié occidentale de la commune se partage entre de vastes bois, notamment celui de Tanaïs, la viticulture, et les zones habitées. Les châteaux viticoles constituent encore aujourd'hui une activité importante de la ville et contribuent à la structure du paysage.

Source Wikipédia.

Importance du sous-sol côté eau et côté vin  

 Blanquefort, première commune du Haut-Médoc, produit des vins de qualité dont l’essentiel est attribué à son terroir. « Le sol est un élément essentiel à leur caractère. On trouve à l’est en bordure du fleuve, limités au chemin de Labarde, des terrains gagnés sur la rivière colmatée d’alluvions très fertiles, refoulés par pompage des vases de la rivière. En traversant la route, on trouvait des marais inondables, aujourd’hui asséchés de tourbe et en sous-sol graveleux de très grande profondeur, ce lit de rivière s’arrêtant au lieu-dit « Port du Roy ». Sur le côté midi, on trouve des terrains argileux, calcaires. Côté ouest, un sol argileux avec sous-sol de marne grise ou de moellons tendres, ainsi qu’une bande de terrain au couchant de Breillan, vers Jacques un terrain de sable noir graveleux. Côté nord-est, des terrains de sable graveleux, du chemin de la gare à la limite de Parempuyre, s’arrêtant au levant au marais au nord-ouest au Clapeau. Cet exposé sans aucune prétention de ma part peut vous surprendre, d’autres plus qualifiés pourront mieux les décrire, mais la composition des sols a une grande importance en agriculture, tout particulièrement pour la vigne quand les racines plongent profondément, ce qui est nécessaire à son développement et à sa valeur nutritive. Son sol contribue à la variété de ses vins… » L’auteur détaille ensuite la nature du sol et sous-sol pour chaque château.

Raymond Valet, feuillets d’une mémoire, 1984, G.A.H.BLE, p. 63.

 

Une rivière souterraine 

Quand j’étais enfant, un ancien Blanquefortais racontait qu’il y avait une rivière qui passait sous la Garonne ; évidemment, je ne le croyais pas et pourtant aujourd’hui c’est une réalité démontrée par les progrès scientifiques d’investigation ;

« Le stade sera construit sur d'anciens marécages ? Il aura des pieds géants. Beaucoup semblent surpris en apprenant que le stade reposera sur des milliers de pieux. Rien d'anormal. Le quartier du Lac voulu par Jacques Chaban-Delmas et créé sous la baguette de l'architecte-urbaniste Xavier Arsène-Henry, grand prix de Rome, repose sur d'anciens marécages. Tous les bâtiments, sans exception, sont construits sur des pieux. Les halls du parc des expositions sont ceux qui en comptent le plus. Comme le montre le croquis ci-contre (signé Arsène-Henry), cette façon de faire est absolument nécessaire. Pour être stables, les ouvrages doivent prendre appui sur un sol très dur. Pour trouver ce dernier, les pieux traversent plusieurs couches de tourbe, vase, graviers, moraines, sables ou végétaux, les nappes phréatiques et même une rivière souterraine. Cette masse d'eau en mouvement part des Pyrénées et rejoint l'océan au large du Verdon. Les pieux descendent ainsi à plus de 20 mètres , la hauteur, en gros, d'un immeuble de 10 étages. Suivant la surface occupée par les ouvrages, il en faut des centaines, voire des milliers, ce qui sera le cas pour le futur stade. À titre d'exemple, il a fallu couler 900 pieux (de 10 à 20 mètres de profondeur) pour poser les ombrières de la ferme solaire du parking du parc des expositions. Et pourtant ici, les structures sont très légères. Alors, pour un stade… »

Article du journal sud-ouest du mercredi 26/10/2010 de Jean-Paul Vignaud

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Blanquefort se met en quatre     

À partir de septembre 2001, en vue de faciliter les échanges entre les élus et les habitants, la commune de Blanquefort, après un temps de réflexion en commissions, a partagé son territoire, en quatre quartiers géographiques que les habitants ont désigné eux-mêmes en mai 2002 : Majolinas, contraction de Majolan et Linas (couleur violette), Caychac (couleur marron), le Bourg (couleur jaune) et les Rainettes, nom tiré du lieu-dit La Renney (couleur verte)… Le découpage propose un nombre d’habitants assez homogène, 3 000 habitants environ à l’exception de celui de Caychac 5 000 environ, avec dans chacun un équipement ou un bâtiment référent (école, centre commercial…) et une certaine mixité sociale.

Lettre du conseil municipal de Blanquefort n° 4 novembre 2001 et n° 7 mai 2002.

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D’où est venue cette idée de ce partage en quatre, peut-être de l’histoire locale ou de plus loin encore ?

Blanquefort, comme de nombreux villages médocains des bords de Garonne ou de Gironde, a été édifié à l’embouchure d’une Jalle qui prend sa source dans la lande, facilitant l’évacuation de l’eau de l’intérieur du Médoc, d’ouest en est. Une première observation met en valeur la différence entre la zone des marais et celle des terrains de grave dont la ligne de partage correspond en gros au tracé sud-nord du chemin de fer qui emprunte à partir de 1865 le terrain le plus plat possible.

Mais on peut aussi repérer aujourd’hui 4 zones géographiques différentes : le village (bourg, maisons et jardins), la vigne, le marais, la forêt.

En 2005, la commune a fait élaborer une « charte paysagère et esthétique urbaine »(Charte paysagère et esthétique urbaine, 2005, atelier Anouk Debarre, déposée au service des espaces verts de la mairie de Blanquefort.).

D’emblée, il est noté que « le territoire de Blanquefort se développe dans un paysage riche d’une vallée, d’un coteau, d’un plateau (urbain), de forêts et de cultures ». Ces 4 entités paysagères sont ainsi présentées.

La vallée de la Garonne et les jalles : 

elle occupe la plus grande partie du territoire de la commune. Les Jalles qui parcourent le territoire de la ville de Blanquefort sont des affluents de la Garonne et créent un vaste espace humide qui donne à l’environnement une forte image de nature – miroirs d’eau créés par les Jalles, lacs, résille des fossés et des canaux – prairies humides pâturées, saules blancs, bocage de feuillus, abondance légère des cortaderia [herbe de la pampa], alignements des peupliers d’Italie. Des chemins parcourent cette campagne sur des chaussées surhaussées semblables à des digues.

Le coteau :

les Jalles et la Garonne forment un système hydrographique qui met en évidence un coteau « en équerre » dont le versant doux constitue un espace tampon entre la ville résidentielle du plateau et la plaine humide. Ce réseau hydraulique dense influence l’ambiance paysagère de cette frange bocagère avec ses alignements de peupliers, ses haies de saule et d’aulnes. La bordure du plateau, bâtie d’habitations diverses, empêche d’accéder facilement au belvédère sur la plaine.

 

Le plateau urbain :

la ville de Blanquefort est édifiée sur le plateau limité d’un côté par la plaine de la Garonne et la vallée des Jalles et de l’autre par la forêt. De nombreux parcs de châteaux ponctuent la partie la plus urbanisée de la ville par des arbres souvent centenaires : chênes pédonculés, pins parasols, cèdres, taxodiums roux [cyprès chauves ou de Louisiane] en hiver, platanes majeurs… Ces parcs côtoient des jardins potagers et les laurières des quartiers résidentiels. Ils constituent des repères dans la ville et quelques sujets isolés peuvent même être considérés comme des signaux forts au milieu d’un tissu urbain. L’effet de nature est par ailleurs accentué par la présence de nombreux espaces verts, terrains de sport, squares ou vignobles. Tous ces parcs vieillissent et la ville de Blanquefort doit veiller à leur renouvellement pour que, dans l’avenir, ce patrimoine végétal reste l’atout majeur de son cadre de vie.

Le plateau, forêt dense et mosaïque de vignobles :

Blanquefort est la porte du Médoc : forêt de pins, bosquets de chênes, prairies et vignes composent un damier paysagé dans lequel un bâti traditionnel trouve encore sa place, fermes, cabanes de résiniers, granges de bois, chais à vin… Ce paysage de campagne contraste avec le développement d’un nouvel habitat de type résidentiel autour de rues qui impliquent la limite du mur continu.

 

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La charte illustre ce partage par un code de couleur sur la carte ci-dessus :

  • en bleu : la vallée de la Garonne et les Jalles
  • en ocre : le coteau
  • en jaune : le plateau urbain
  • en vert : la forêt et le vignoble.

En 1984, Raymond Valet un bon connaisseur de sa commune, faisait remarquer dans une envolée littéraire qu’« il nous reste en définitive aux quatre points cardinaux, quatre propriétés produisant quatre vins type bourgeois, quatre vins différents de brillante qualité, ce qui conserve le renom de nos vins récoltés dans notre cité ». Il pensait aux châteaux Dillon, Saint-Ahon, Dehez et Clapeau. Raymond Valet, Feuilles d’automne, Publications du G.A.H.BLE, 1984, p.70.

 

En 1943, un rapport administratif décrivait ainsi la commune : « La superficie communale totale est de 3 260 ha ; les près occupent 499 ha, les marais 494 ha, la vigne 476 ha, les terres labourables 473 ha, les landes 369 ha, les pâtures 147 ha, les jardins particuliers, très nombreux 46 ha ».

Extrait du relevé des allocations familiales en agriculture du 13 février 1943, commune de Blanquefort, archives municipales

On y retrouve la constante agricole des terres (près, pâtures, terres labourables), de la vigne, du marais et des jardins particuliers près des maisons…

En 1811, le cadastre indiquait que la commune est répartie en 4 sections : la Lande, le Milieu, la Landille, la Palu. « Les 5 000 parcelles environ sont constituées de terres labourables, vignes, aubarèdes, pâtures, près, jardins, taillis, bois de futaie, acacias, bois de pins, vergers, friches, landes, jardins, marais, chemins, ruisseaux, etc. »

Jean Lafitte : l’ancien cadastre de 1811 de la commune de Blanquefort, Bulletin du G.A.H.BLE n°17, juin 1991.

Il est possible que ce soit pour faciliter la lecture des cartes cadastrales que la commune ait été partagée, mais c’est en quatre et non en trois ou en cinq.

N’est-elle pas surprenante cette permanence du chiffre 4 dans notre commune !

On emprunte la route des Quatre-Ponts en allant à Bordeaux par Bruges dans le sens nord-sud, mais également quatre ponts différents permettent de franchir la Jalle dans le sens ouest-est pour aller dans le Médoc…

Il est vrai que, dans la vie courante, de nombreuses expressions reprennent ce chiffre : manger comme quatre, avoir de l’esprit comme quatre, monter un escalier quatre à quatre, (donner rendez-vous) à un de ces quatre (matins), se mettre en quatre (faire de grands efforts), ne pas y aller par quatre chemins (être direct), aller aux quatre coins du monde, sans pour autant couper les cheveux en quatre, etc.

Dans la symbolique, le chiffre 4 fait référence aux éléments naturels, eux-mêmes au nombre de quatre : la terre, l’air, le feu et l’eau. Le 4 est également le nombre des saisons, des fleuves du Paradis, des évangélistes, des points cardinaux (nord, sud, est, ouest) qui permettent à l'être humain de se repérer dans l'espace. Au final, le 4 symbolise la Terre, c’est un symbole matériel. La couleur associée au nombre 4 est le vert. Son symbole graphique est le carré ou la croix, croix qui est un symbole si souvent repris dans les religions, d’une part chez les Celtes et les Nordiques, d’autre part chez les Chrétiens.

En effet,le 4 se retrouve dans de nombreuses mythologies et religions du monde : les Chinois le lient à la Terre qu’ils croyaient carrée (Alain Tridant, Les carreaux de pavements de la forteresse médiévale de Blanquefort (Gironde), Publications du G.A.H.BLE, 2005 ; p. 47), l’auteur cite Christian Houzel,  Le cercle, le carré, deux figures de la symétrie, Zodiaque n° 8, octobre 2001 : « Les anciens Chinois considéraient le ciel comme circulaire au-dessus d’une terre carrée : le temps, cyclique, était aussi apparenté au cercle. On retrouve ce lien du temps en Inde, où cependant le carré, symbole d’immobilité, était considéré comme plus parfait que le cercle »); pour les Aztèques, il y avait quatre arbres pour soutenir le ciel. Il y avait encore les quatre fleuves qui coulaient dans le jardin d’Eden, le paradis terrestre. Considéré comme l'essence des quatre éléments, des quatre qualités fondamentales des corps : sec, humide, froid, chaud ; des quatre principes géométriques : point, ligne, plan, solide ; les quatre notes fondamentales de la gamme ; les quatre figures symboliques du char de la vision d'Ezéchiel traduite par les quatre évangélistes, etc... Le 4 nous emmène tout droit dans l'univers symbolique du carrefour ; il symbolise la constance, la stabilité, la réussite accompagnée de l'effort.

 

Il apparait ainsi que notre petite ville de Blanquefort s’est construite sur de bonnes bases : carrefour, équilibre, stabilité et réussite. Continuons à nous mettre en quatre pour elle.

Texte d’Henri Bret.