La traite négrière 

 

Longtemps ignoré, le passé négrier de Bordeaux est maintenant mieux connu. Située dans la banlieue de cette ville, la paroisse d’Eysines a été, à divers titres, concernée par cette activité.

Plusieurs négociants qui armaient des navires pour la traite possédaient à Eysines des résidences.

* Salomon Lopès Dubec, propriétaire du bourdieu de Peyron (aujourd’hui « les Tilleuls »), né en 1743, fils de Daniel Lopès, négociant israélite portugais, et de Judith Francia. Il est choisi en 1788 avec Furtado comme député de la « nation portugaise » auprès de la commission Malesherbes constituée pour élaborer un statut des juifs en France. En 1774 et 1776, il arme l’ « Hector » pour la traite (Gorée et Côte d’Or pour Cap Français puis Gambie pour Fort Dauphin).

* Samuel Alexandre, propriétaire de la maison noble de la Forêt, époux de Rachel Gradis, fille de David Gradis, également juif Portugais. En 1741, il arme l’ « Africain » pour la traite (Guinée et Martinique)

* Simon Rocaute de Bussac qui, de 1768 à 1776, arme cinq navires. Il descend de Pierre Rocaute, propriétaire de la maison noble de Bussac au début du 18e siècle ; s’il n’habite pas à Eysines, il y est rattaché par son nom.

* Pierre Duret, propriétaire du château de Lescombes, souvent mis en avant pour ses idées libérales et qui avait marié l'une de ses filles avec un Balguerie, d'une des plus célèbres familles de négriers bordelais.

* D’autres Bordelais possédaient « aux Amériques » des plantations où se pratiquait l’esclavage. C’est le cas de Jean Vosselle, propriétaire de la Mothe (Lescure) résidant en Amérique  (Saint-Domingue) : habitations de Joly Trou et de Grande Rivière. Un inventaire de ses nombreux biens établi en 1779 se termine par 39 nègres et 23 négresses tous en état de service, 14 nègres et 16 négresses infirmes, 28 négrillons et 16 négrites, 24 mulets, et des animaux domestiques. Les noms de tous les mulets sont cités, mais seuls les « nègres et négresses en état de service » ont cet honneur.

De nombreux noirs, esclaves libérés, vivaient à Bordeaux.

« Le 16 juillet 1774 [à Eysines], Jean Thomas, âgé de vingt et huit, nègre appartenant à Monsieur Jean Laborde, ancien procureur général de l’Isle Royale, habitant de cette paroisse, a été baptisé sous condition, son parrain a été M. Jean Laborde son maître, et Dlle Louise Laborde sa marraine ». Jean Thomas appose sa signature sur l’acte, il avait donc reçu une éducation que bien des Eysinais n’avaient pas.

Texte de Michel Baron