Les fêtes à Eysines 

Samedi 7 mars 2020, à 15 h, à la salle du Préau du Pinsan, plus de quatre-vingt personnes ont assisté à la conférence « Il était une fois la fête ! » présentée par Francine Bourguinat, secrétaire générale de la Société des Fêtes de la Saint-Jean. Pendant près de deux heures, l’intervenante a analysé la notion même de fête, puis elle a présenté les différents types de manifestations festives vécues à Eysines et enfin elle nous a fait revivre la fête locale si chère aux Eysinais en s’interrogeant sur les origines de la fête de la Saint-Jean, tout en y intégrant des approches de sciences humaines diversifiées.

Elle s’est appuyée pour construire un diaporama très documenté et particulièrement exhaustif sur de nombreuses photographies appartenant à différents fonds privés mais aussi sur des documents mis à sa disposition par notre association : la carte de Masse, des photos, les textes des visites épiscopales et ceux des dossiers « voiries » et le précieux cahier d’Emmanuel Durand.

La fête, les fêtes 

La fête se caractérise par des aspects matériels et immatériels (ambiance, vécu). C’est une période de réjouissance collective, limitée dans le temps. Il y a des fêtes publiques souvent d’origine chrétienne ou plus anciennes assimilées par le christianisme et des fêtes privées.

Les fêtes ayant existé à Eysines à diverses époques et avec une plus ou moins grande longévité sont variées. La fin du XIXe siècle voit apparaître des sociétés autorisées des fêtes dans les villages de La Forêt-Grand Louis en 1882, du Vigean en 1884, du Bourg et de Lescombes avant 1891.

 

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 Un char du carnaval à Eysines, les enfants déguisés pour le mouton gras avec M. Pinos, boucher à Lescombes.

Le carnaval à Eysines est une fête importante et populaire qui mêle chars, déguisements, masques, confettis et serpentins. Le 18 février 1888, Emmanuel Durand, notre premier pharmacien eysinais mais aussi correspondant littéraire de la « Petite Gironde » relate la première fête carnavalesque « Au bourg d’Eysines fête carnavalesque organisée par la jeunesse de la commune, défilé de cinq sociétés avec fanfares de 15 h à 17 h (remise des prix) –salle Dufau : bal avec orchestre.» Il rappelle aussi que cette fête succède à « des carnavals délaissés depuis longtemps à Eysines ».  Dix-huit photos se succèdent sur l’écran : chars (le plus ancien tiré par un cheval), fanfares, majorettes, tambours majors et cantinières, enfants déguisés, etc… Les chars sont préparés par des bénévoles pendant de longs mois.

Le bœuf gras est honoré le jeudi précédant le mardi gras avec un défilé des enfants et du bœuf qui s’arrêtent chez le boucher. Des photos de 1925 et 1927 nous font revivre cet événement.

La fête du mouton gras a lieu deux jours après celle du bœuf gras. En 1891, Emmanuel Durand décrit la promenade annuelle et traditionnelle des moutons gras accompagnés par des enfants déguisés, brandissant le drapeau tricolore.

Des manifestations sportives sont organisées par les sections sportives des associations (gymnastique, athlétisme, foot, rugby). Au début du XXe siècle, ces associations se nomment : l’Ardente, le Tout Eysines, l’Etoile Sportive Eysinaise. Le concours hippique se pratique indifféremment avec des chevaux de trait ou de courses et anime la Grand’Rue du Bourg à Lescombes. Des photos des années 1950 montrent cette belle fête.

Lors de la conscription, les jeunes gens vont procéder au tirage au sort à Blanquefort, ils partent à pied et en chantant, accompagnés par la fanfare eysinaise. Le soir, la fête se termine par un banquet à Eysines.

La fête de la Sainte Cécile, fête des musiciens, se déroule chaque 22 novembre. Elle donne lieu à un grand concert l’après-midi avec quelques musiciens célèbres, le soir, un banquet termine la journée.

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En 1909 la société de gymnastique et le concours hippique dans les années 1950.

Les fêtes de patronage des écoles laïques, des associations, la fête de Noël des enfants, les kermesses sont aussi l’occasion de réjouissances.

Enfin, les fêtes commémoratives (celle de la Libération en 1945, celles du 14 juillet, du 1er mai) sont célébrées comme dans tout le pays.

La fête de la Saint-Jean 

Ses origines : Francine Bourguinat se pose (et nous pose) la question de l’origine de notre fête locale, désignée sous le vocable de Saint Jean Baptiste. Ce n’est pas une fête patronale : en effet, le patron d’Eysines est Saint-Martin. Dans les villages alentour, les fêtes locales correspondent bien à leur saint patron : Sainte-Christine au Haillan, Saint-Hilaire au Taillan, Saint-Pierre à Bruges.

Quelles sont donc les autres « pistes » ? Après une invitation au voyage dans différents pays et régions de France où la fête de la Saint-Jean est célébrée avec des usages multiséculaires et en lien avec le solstice de l’été, les rites antiques du culte du soleil et de la récolte, nous découvrons que cette célébration du 24 juin est un exemple de syncrétisme et de réutilisation par le christianisme de fêtes et de cultes païens antérieurs, ainsi que d’un symbolisme solaire que beaucoup ont oublié. Nous en retrouvons cependant encore trace dans la pratique, ce jour-là, des feux de sol ou d’artifice, de la musique et de la danse populaire… Nous constatons aussi que l’ordre de Saint Jean de Jérusalem de Bordeaux est seigneur foncier du Vigean. Sur ses terres est établie une maison modeste qui permet aux Templiers de recevoir les contributions de ses tenanciers. D’autre part, l’étude des textes des visites épiscopales, nous apprend qu’en 1691 une « frairie » de la Saint Jean est établie et en 1735 nous lisons :« …il y a une confrérie Saint-Jean-Baptiste établie par Innocent XI pape à laquelle Monseigneur de Berons donna des statuts en 1703… ». Enfin, une des nombreuses Sociétés de Secours Mutuels eysinaises se nomme la Saint Jean. Les recherches sont donc encore à poursuivre pour préciser ces origines. Une constance est cependant observée au fil des siècles : la recherche de « bienfaisance » et d’ « entr’aide » est annoncée par toutes ces entités qui se sont légalement succédées selon les autorisations ou interdictions nationales du moment. Maillon contemporain de cette mouvance, la Société des fêtes de la Saint-Jean est également reconnue en tant que « comité des fêtes de bienfaisance » …

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Le feu de la Saint-Jean et son feu d’artifice.

La Saint-Jean d’hier à aujourd’hui : la fête se caractérise au cours du temps par des manifestations, des pratiques festives diverses. Les fêtes se déroulent en plein air. Succédant à une pratique de bals en salles devenues trop petites au cours du XXe siècle pour abriter une population grandissante, un chapiteau en bois avec toiture bâchée, scène et plancher pour la piste de danse est installé sur la place de l’école des garçons de 1952 à 1970 pour la fête de la Saint-Jean. À la même période d’installation, ce chapiteau sert aussi pour les autres fêtes comme celles des écoles et de l’amicale laïque. Le foyer culturel étant construit remplacera ensuite cette installation éphémère.

Emmanuel Durand écrit sur la fête de la Saint Jean en 1891 : « le bal champêtre sur la place de la Mairie (salle luxueuse et orchestre de choix), jeux multiples et amusements de la foire aux plaisirs, avec un jongleur et la Société musicale l’Avenir d’Eysines se fera entendre de 16 à 18 h sur la place de la mairie ; retraite aux flambeaux et feu d’artifice pour clore les fêtes. La compagnie des omnibus et tramways de Bordeaux ajoutera un service supplémentaire de voitures qui partiront du boulevard de Caudéran de 7 h à 22 heures » Il relate aussi cette fête les années suivantes.

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 La fête foraine bat son plein.

Dès 1929, date de sa « création » en tant qu’association de loi 1901, mais vraisemblablement issue d’entités festives précédemment autorisées, c’est la Société des Fêtes de la Saint-Jean qui organise la fête. Une cinquantaine de photos de périodes différentes nous font cheminer de Lescombes à la gare.  Les stands divers sont installés dans la Grand’Rue entre la place de Lescombes et la place de l’école des garçons. Dans la rue, les manèges côtoient les stands de loteries, de tirs et de friandises. Nous avons retrouvé aux archives municipales un arrêté préfectoral autorisant l’arrêt de la circulation sur cette portion de voie faisant lien festif entre ces deux villages qu’étaient Lescombes et le Bourg. Cet emplacement reste le même jusque dans les années 1970 où la fête est installée près du foyer culturel, de l’église et de la nouvelle mairie. Le feu de la Saint Jean est allumé jusqu’aux années 1975 à côté de Bois-Salut. Le feu d’artifice est tiré dès 1946 au Vignan sur des terrains privés et à partir de 1970 sur le terrain de foot de Bois-Salut. Ce feu d’artifice est financé par les Eysinais grâce à une collecte au porte à porte, réalisée par les bénévoles de la Société des Fêtes de la Saint Jean jusque dans les années 1980, puis offert par la ville jusqu’à son arrêt pour des raisons de sécurité dans les années 2010. Le lundi « le plus rapproché du 24 juin », ancien jour de foire décrété en 1850 par Louis-Napoléon-Bonaparte, est devenu jour du maire vers 1975 et les enfants participent à diverses courses : à l’œuf, en sac, en trottinette etc…

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La Saint Jean devenue Festifolies depuis 1987.

Bien sûr, toutes ces fêtes sont prétexte à se « mettre en dimanche », étrenner une nouvelle robe, présenter son-sa fiancé-e. C’est aussi l’occasion de se réunir pour un repas de famille qui rassemble petits et grands avant d’aller « à la fête ».

En 1987, la Fête de la Saint-Jean évolue en « Fête de la Patate » et en « Festifolies ». Durant quatre jours, le foyer culturel ne suffisant plus, spectacles, banquets se déroulent à nouveau sous un nécessaire chapiteau imposant entouré de stands de restauration éphémères tenus par des bénévoles. Eveillant les cinq sens, la fête foraine et ses attractions multiples se déploient à côté de cette enceinte fermée et sécurisée. Depuis sa création en 1929, la Société des Fêtes de la Saint-Jean organise d’autres manifestations festives tout au long de l’année et, désormais, au travers de ses différentes sections.

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Quelques affiches des Festifolies.

 

Après une invitation de l’intervenante à poursuivre ce point d’étape de recherche sur l’origine de la fête locale et de l’association qui l’organise, le voyage dans le temps et l’univers de la fête que Francine Bourguinat nous a fait vivre se termine dans une salve d’applaudissements. Francine Bourguinat et Marie-Hélène Guillemet échangent alors des remerciements au nom de leurs deux associations et se félicitent de ce moment d’enrichissement, de partage et de convivialité qui se termine autour du verre de l’amitié.

Notre affiche et une des nombreuses illustrations du diaporama de Francine Bourguinat.

Texte de Marie-Hélène Guillemet et Elisabeth Roux, revu par Francine Bourguinat, illustrations et photographies extraites du diaporama de Francine Bourguinat : blog de l’association Connaissance d’Eysines, 6 avril 2020. 

 

 

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