Une épidémie à Eysines en 1861 

Les pandémies de grippe A nous rappelle qu'Eysines a été périodiquement éprouvée : il y a eu la dysenterie en 1779, le choléra en 1849, la diphtérie en 1860.

À cette époque, la médecine, sous l'impulsion de grands savants tels que Claude Bernard ou Louis Pasteur, devient plus scientifique, les diagnostiques plus rigoureux... La note sur une épidémie de diphtérie, publiée par le docteur Landeau en 1861, s'adresse à ses confrères qui, fidèles à leurs habitudes, utilisent des traitements inefficaces et obsolètes ! Ce médecin exerce à Eysines. Il a un collègue, le docteur Barrière, qui en 1850 a fait don à la commune du terrain de l'église. Dans ce document, il décrit avec précision les symptômes de la maladie : « gonflement des ganglions sous maxillaires, concrétions sur les amygdales... » Il énumère les médicaments utilisés pour combattre le mal à base de nitrate d'argent, de chlorate de soude...

« De juillet 1860 jusqu'à la fin d'avril 1861, j'ai traité à Eysines 333 sujets diphtériques, à savoir 273 dans la section du Haillan (partie d'Eysines jusqu'en 1867) et 60 sur le reste de la commune ». Sur ce nombre, 19 sont morts, dont 17 au Haillan. Comment l'expliquer ? Pour le docteur, l'épidémie a davantage sévi au Haillan parce que les habitants n'y ont aucun souci de l'hygiène : « ils négligent leurs maisons d'une façon déplorable, constamment fermées et sales ». D'autre part, ils utilisent des eaux polluées : « Auprès de sa maison, chaque jardinier entasse du fumier qu'il faut arroser souvent. Pour plus de facilité, on le place près du puits ou des fontaines. L'eau, par infiltration, retourne au réservoir d'où elle est sortie... Il existe au Haillan plusieurs mares où l'eau croupit. C'est là que tous les jours, des femmes viennent laver leur linge. »

La note du médecin est peut-être discutable dans la mesure où le village est déjà pourvu d'un lavoir évoqué par une délibération du conseil municipal de novembre 1851 ; la loi du 3 février a décidé que l'État rembourserait aux communes le tiers des sommes investies pour la construction de lavoirs. Entre 1854 et 1857, l'aqueduc du Thil a été construit pour approvisionner le nord de Bordeaux en eau de qualité. Par ailleurs, les élus favorisent la création de sociétés de secours mutuel. Il y en a une par village : par exemple au Haillan, la Société des Amis de la Sagesse a été fondée par M. Jeantet, maire d'Eysines. Les plus pauvres en sont exclus du fait qu'ils ne peuvent payer les cotisations. Aujourd'hui, comme jadis, les enfants sont les plus exposés ; serait-il raisonnable de ne pas prendre le maximum de précautions ?

Michel Cognie, article extrait du bulletin n°76, mai 2014, du G.A.H.BLE.