L’instituteur ferme la page

 

 

Ce vendredi, dernier jour de l’année scolaire, marquait aussi la fin de la carrière de Jean-Pierre Lafon. Après avoir enseigné à Macau pendant trente-quatre ans, il faisait valoir ses droits à la retraite. Plus de 1000 élèves sont passés dans ses classes et chacun, qu’il soit plombier, archéologue ou médecin, peut dire : « c’est lui qui m’a donné les rudiments du savoir que je possède. »

À 19 ans, frais émoulu de l’École normale, Jean-Pierre Lafon commence à enseigner. À 22 ans il est nommé à l’école primaire de Macau, où il avait été élève, établissement qu’il ne quittera plus jamais. Adepte de la pédagogie Freinet « basée sur l’expression libre des enfants », il est à l’origine des « classes vertes ». Alors qu’il n’y avait pas de subvention, il organise le ramassage du verre et des buffets campagnards pour les financer.

Modeste et discret : en dehors de l’école, il s’est aussi investi pour les jeunes en tant qu’instigateur des premiers centres de loisirs sans hébergement (CLSH). Entraîneur et dirigeant de l’équipe de foot, il accueille une classe de CM2 de l’île de la Réunion pendant la Coupe du monde de foot en 1998. C’est un défenseur du patrimoine local qui a, par exemple, organisé le nettoyage et la mise en valeur du lavoir. De plus, cette année avec ses collègues et les élèves de l’école, il s’est consacré à l’écriture d’un livre : « Macau au fil des mots ».

C’est un homme modeste et discret qui n’aime pas parler de lui. Les succès, il les partage avec ses collègues, les parents et les élèves. Ce qu’il a moins bien réussi, il l’assume tout seul. Vendredi soir, la foule qui était dans la cour de l’école était un témoignage de la gratitude que lui portent ses concitoyens : le maire adjoint et les conseillers municipaux étaient présents, aux côtés de ses parents, sa femme, ses enfants, ainsi que sa fille Pauline qui assure la relève comme professeur des écoles.

Il y avait également des collègues qui l’ont accompagné tout au long de sa carrière, ses anciens élèves, des quadragénaires grisonnants, et les plus jeunes qui ont chanté : « adieu Monsieur l’instituteur ». Un témoignage de reconnaissance de tout un village à un « hussard noir de la République », comme Charles Péguy appelait ces instituteurs ayant reçu mission d’instruire la population française.

Article et photo du journal Sud-ouest du 8 juillet 2013, Louis Le Cor.

Après trente-quatre ans de carrière, Jean-Pierre Lafon a reçu de nombreux témoignages de gratitude.