Le château Lassalle 

Ce chateau s'appellera plus tard le château de Villepreux.

En 1308, le premier seigneur connu est Fust d'Ornon qui, probablement, bâtit la première maison forte. La Salle fut d'abord une petite châtellerie qui dépendait des seigneurs de Blanquefort jusqu'en 1601, date à laquelle le duc de Duras morcela ses biens et transféra ses droits de justice à la seigneurie de Saint-Aubin. De 1429 à 1439, le seigneur est Ramond Arnaud de Béarn. On trouve en 1480 et 1490, Gaillard de Domaseau, écuyer, damoiseau, licencié es lois, qui épousa Blanche de Ségur.

Le château Lassalle fut, plus tard, la propriété d'un certain Jean Sainxe puis appartint aux Ferron. L'un d'entre eux est enseveli dans l'église où l'on peut voir son blason avec l'inscription : "Ci gist Lancelot de Ferron, escuier, seigneur des maisons nobles de Ferron, de Saint-Aubin, de Copian, de Bricaile et autres lieux et maisons nobles - du 14 Aoust 1583".

Au 17e siècle, le château fort fut démoli et remplacé par celui qu'on voit aujourd'hui. Par la suite, les registres paroissiaux de B.M.S. (baptème-mariage-décès) nous permettent de reconstituer la liste de ses habitants ou propriétaires et nous en donnent quelques précisions.

Mademoiselle de Ferron, dame de Saint-Aubin, épouse Claude Millivel de Masparaulte de Montmares qui meurt en 1662 et qu'on ensevelit dans l'église. Leur fils Octavien de Masparaulte épouse dame Catherine de Lalo (1622-1667) qui lui donne au moins quatre enfants : un garçon mort à quatre ans en 1659 et trois filles : Anne, Catherine et Magdelaine. Anne, l'ainée, épouse en 1676, Jehan-Antoine de Raoul, Conseiller au Parlement de Guienne. Ils ont trois garçons: l'un qui meurt à sa naissance en 1705, Jean-Antoine qui recueillera l'héritage et Guillaume dont on ne sait rien.

Jean-Antoine de Raoul, le deuxième du nom épouse à St-Aubin, le 27 septembre 1751, Marie-Henriette Berard des Varennes. Comme ils habitaient Bordeaux, c'est l'archevêque qui donna l'autorisation de mariage à Saint-Aubin, par un document en latin que nous avons retrouvé. Jean-Antoine est l'auteur d'un "sottisier" qui serait conservé à la bibliothèque municipale de Bordeaux, mais que nous n'avons pas consulté. Comme le marié était âgé de quarante ans, on ne relève pas de traces d'enfant dans ce couple. Par contre, un des témoins à la cérémonie fut Raymond de Villepreux, son beau-frère. Nous ne savons pas comment s'est faite cette alliance, mais on la trouve sur un document de 1754. Raymond devint ensuite propriétaire du château Lassalle auquel il donna son nom.

Le fils de Raymond et de Marie, son épouse, Pierre de Villepreux, naquit en 1735. Il servit dans les armées royales puis émigra pendant la Révolution. Il mourut à Saint-Aubin dans son château qu'il avait récupéré, en mars 1817. Son acte de décès mentionne sa qualité de chevalier de l'Ordre Royal militaire de Saint-Louis. Pierre avait épousé Marie-Thérèse-Françoise La Colonie (1750-1798) qui, n'ayant pas émigré, mourut à Saint-Aubin. Ils eurent, en 1787, une fille, Marie de Villepreux, qui épousa en 1813, à Saint-Aubin, un riche bourgeois de Bordeaux, Sclafer Louis-Antoine, dont elle eut un fils, Joseph, en 1817. Sclafer vend son château en 1823 au sieur Maisonnobe, marchand de biens à Saint-Médard.

L'année suivante, celui-ci le revend au Père Jean-Baptiste de Martres, lequel, après transformations, y fonde un monastère de trappistes dont il fut l'abbé jusqu'à sa mort en 1826. Le dernier trappiste décédé à Saint-Aubin mourut en 1831, mais le frère Nivard, sous-prieur, continua à administrer la propriété jusqu'à son départ en 1838. Il faisait aussi fonction de curé-chapelain de Saint-Aubin. Les trappistes étaient ensevelis dans l'enceinte du domaine et c'est probablement leurs restes qu'on a trouvés en creusant pour bâtir le centre d'accueil de l'Aérospatiale. C'est parce que le ruisseau "Le Cagaréou" traverse la propriété des moines qu'on l'appelle aussi "Ie Monastère".

En 1844, le château fut acquis par Charles Soissons, mari de Anne-Victoire Mel de Saint-Ceran. Leur fille Jeanne épousa Charles Langlois, fils d'Eugène Langlois (1763-1837) qui était déjà propriétaire du château de Cujac. Sous le nom de Villepreux, le château restera la propriété des Langlois jusqu'en 1958, date à laquelle il sera vendu à la SEREB qui deviendra l'Aérospatiale.

Charles Langlois, tout en administrant ses propriétés et la commune de St-Aubin, était aussi notaire rue de Grassi à Bordeaux. C'est lui qui enregistra le contrat de mariage de Napoléon III avec Eugènie de Montijo. Il fut maire pendant dix-huit ans, de 1846 à 1874, date de sa mort. Son fils Raymond Langlois, époux de Rose Lespiaut, lui succéda à la mairie de 1874 à 1876, puis de 1890 à 1897. Ernest Langlois prit sa succession jusqu'en 1909, puis laissa la place à Henri Langlois jusqu'en 1929. Jacques Langlois hérita de son père. Il mourut sans enfant. Sa veuve morcela la propriété.

Les domaines du château Lassalle semblent avoir été assez étendus, puisque les immenses landes de Boutuges en faisaient partie. Les seigneurs, au 17e et au 18e siècle, avaient, semble-t-il, d'excellentes relations avec leur personnel : domestiques, pasteurs, métayers et brassiers, car on relève de nombreux parrainages d'enfants et beaucoup de témoignages pour les autres actes d'Etat-Civil.

Texte extrait du livre du René-Pierre Sierra, Chronique de Saint-Aubin-de-Médoc, juin 1995, éditeur mairie de Saint-Aubin-de-Médoc, p 76-79.